Ce matin

Marina Rémy, Anaïs Loumeau, Oumaïma Mekran, Angelina Meziane, Jeanine de Cardaillac.

Ce matin j’étais pressée de venir. Exactement comme Anaïs, une des héroïnes de l’histoire que j’écris et qui porte le même prénom que moi. Sauf qu’elle ne manque pas l’école pour se retrouver dans un groupe de filles, qui doivent inventer comment quatre filles, qui portent le même prénom qu’elle, se retrouvent pour s’amuser.
Si c’était nous, je dirais qu’elles s’amusent en se racontant des trucs et en mangeant des bonbons… Mais, quand je l’écris, ça manque de mots qui font peur et qui donnent envie de lire.
Je m’appelle donc Anaïs, mais je pourrais aussi dire que je suis Chapitre 1, puisque je dois écrire le chapitre 1. Celui où les filles se retrouvent. J’arrive la première, parce que je suis toujours impatiente. Oumaïma, a passé une éternité à regarder l’heure avant de se mettre en route. Angelina, a failli oublier notre rendez-vous et filer à l’école. Quant à Marina, elle est arrivée en retard parce que son frère l’a réveillée avec des claques. Des histoires j’en ai déjà écrit. Comme celle de l’aigle avec la petite fille qui se noyait. Mais là, je répète les mots et je m’embrouille entre la Anaïs du livre et moi. J’imagine que les copines se crient dessus parce que je leur en veux de m’avoir fait attendre.
Je me demande pourquoi elles ont tiré leur chaise à l’autre bout de la pièce. Elles me tournent le dos pour écrire. Je ne vais pas copier : on n’a pas le même chapitre. Moi, j’ai le deuxième. Celui où les filles cherchent ce qu’elles vont faire. J’ai commencé deux fois, mais c’était pas bon. J’ai beau creuser, rien ne me sort par la tête. On a dit trop de choses. Je ne sais pas les organiser. J’ai envie de lire ce que j’ai écrit alors que je n’ai rien écrit. Je gâche ma journée et ça m’énerve. J’ai qu’à dire qu’elles décident d’aller à la mer pour la journée, je signe Oumaïma, et puis voilà !
Ça m’est égal d’écrire le chapitre 3, d’imaginer qu’on trouve des vélos, qu’on prend une fille sur notre porte-bagages et qu’on file à la gare pour acheter les billets. Le truc, c’est qu’il faut de l’argent. Anaïs et Oumaïma en ont avec elles et Marina en a chez elle mais elle a pas ses clés. J’ai qu’à rajouter qu’on croise la sœur d’Anaïs qui nous les donne. Zut ! On a oublié les maillots et, avec tout ça, on rate le train. Enfin, pas nous : les filles de l’histoire. Parce que moi, les maillots, c’est pas mon truc. Les rendez-vous avec les copines d’école non plus. L’école, ça me rend malade. J’en ai le ventre qui grince, rien que d’y penser.
Elles disent que je suis la râleuse du groupe. On a réfléchi toute la journée et je dois terminer l’histoire. Chapitre 4 : les filles ont raté le train. Angelina elle a fait vite, parce que c’est une rêveuse et que des histoires ça la connaît. Anaïs, elle remplit les pages comme si elle était super entraînée. Oumaïma elle grogne, elle chasse les efforts et puis elle souffle ses idées. Moi, c’est vrai, je râle, mais je lâche pas les amies. Je vais raconter qu’on a fini à la piscine et qu’on s’est éclatées. Ce soir j’écrirai aussi à mes deux autres copines qui ne sont pas là. Je leur dirai qu’on pourrait aller à la piscine samedi, même si la piscine, en vrai, j’ai toujours détesté…

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